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l’aller réciter lui-même, sans mystère, en société ? Non, il en auroit fait, en déguisant son écriture, une douzaine de copies qu’il auroit adressées aux comédiens, aux mousquetaires, aux auteurs mécontens. Je connois comme un autre cette manière de garder l’anonyme ; et, si j’avois été coupable, je l’aurois prise pour me cacher. Veuillez donc vous dire à vous-même : Marmontel, devant dix personnes qui n’étoient pas ses amis intimes, a récité ce qu’il savoit de cette parodie ; donc il n’en étoit pas l’auteur. Sa lettre à M. le duc d’Aumont est d’un homme qui ne craint rien ; donc il se sentoit fort de son innocence, et croyoit n’avoir rien à craindre. Ce raisonnement, Monsieur le duc, est le contre-pied de celui qu’on m’oppose, et n’en est pas moins concluant. J’ai fait deux imprudences l’une de réciter des vers que ma mémoire avoit surpris, et de les avoir dits sans l’aveu de l’auteur. — C’est donc bien à l’auteur que vous les avez entendu dire. — Oui, à l’auteur lui-même, car je ne veux point vous mentir. C’est donc à lui que j’ai manqué, et c’est là ma première faute. L’autre a été d’écrire à M. le duc d’Aumont d’un ton qui avoit l’air ironique et pas assez respectueux : Ce sont là mes deux torts, j’en conviens, mais je n’en ai point d’autres. — Je le crois, me dit-il ; vous me parlez en honnête homme. Cependant vous allez être envoyé à la