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MÉMOIRES DE MARMONTEL

et rayonnante de lumières, comme l’échelle de Jacob. Mon père, avec moins de foiblesse, n’avoit pas moins de piété. Il se laissa fléchir, et permit à ma mère de m’écrire qu’il adhéroit à mes saintes résolutions. En même temps, elle me fit passer quelques secours d’argent, dont je fis peu d’usage ; et bientôt je fus en état de les lui rendre tels que je les avois reçus.

J’avois appris que le collège de Clermont, bien plus considérable que celui de Mauriac, faisoit seconder ses régens par des répétiteurs d’études ; ce fut sur cet emploi que je fondai mon existence ; mais, pour y être admis, il falloit au plus vite me faire un nom dans le collège, et, malgré mes quinze ans, gagner de haute lutte la confiance des régens.

J’ai oublié de dire qu’après la clôture des classes au collège de Mauriac, j’y étois allé prendre l’attestation de mon régent de rhétorique ; il me l’avoit donnée la plus complète qu’il avoit pu ; et, après l’avoir embrassé et remercié tendrement, je m’en allois, les yeux encore humides, lorsque je rencontrai dans le corridor ce préfet qui m’avoit si durement traité. « Vous voilà, Monsieur ! me dit-il ; d’où venez-vous ? — Je viens, mon père, de voir le P. Balme, et de lui faire mes adieux. — Il vous aura donné sans doute une attestation favorable. — Oui, mon père, très favorable ; et j’en suis bien