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noblesse. Or, cette noblesse étoit admise aux soupers du roi. Pourquoi lui n’en étoit-il pas ? C’étoit l’une de ses envies. Il rappeloit l’accueil que Louis le Grand faisoit à Boileau et à Racine ; il disoit qu’Horace et Virgile avoient l’honneur d’approcher d’Auguste, que l’Énéide avoit été lue dans le cabinet de Livie. Addison et Prior valoient-ils mieux que lui ? Et dans leur patrie n’avoient-ils pas été employés honorablement, l’un dans le ministère et l’autre en ambassade ? La place d’historiographe étoit déjà pour lui une marque de confiance ; et quel autre avant lui l’avoit remplie avec autant d’éclat ?

Il avoit acheté une charge de gentilhomme ordinaire de la chambre du roi : cette charge, communément assez oiseuse, donnoit pourtant le droit d’être envoyé auprès des souverains pour des commissions légères, et il s’étoit flatté que, pour un homme comme lui, ces commissions ne se borneroient pas à de stériles complimens de félicitation et de condoléance. Il vouloit, comme on dit, faire son chemin à la cour ; et, lorsqu’il avoit un projet dans la tête, il y tenoit obstinément : l’une de ses maximes étoit ces mots de l’Évangile : Regnum cœlorum vim patitur, et violenti rapiunt illud ; il employa donc à s’introduire auprès du roi tous les moyens imaginables.

Lorsque Mme d’Étioles, depuis marquise de