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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Les militaires couraient à leur poste, les bourgeois par les rues, et les femmes un peu partout, mais sans savoir où elles allaient.

Cependant les principaux citoyens s’étaient tout d’abord portés au château où M. de Frontenac entouré de son état-major se tenait sur la terrasse, laquelle était suspendue au-dessus du cap, pour examiner les mouvements de la flotte ennemie. Le gouverneur fit prier les notables de se rendre auprès de lui, et les ayant salués gravement, il braqua de nouveau une lunette de longue-vue, qu’il tenait à leur arrivée, sur la flotte dont les premiers vaisseaux débouchaient déjà dans le port.

— Monsieur de Bienville, dit bientôt le comte en se tournant vers celui-là qui, jusqu’à ce moment s’était quelque peu tenu en arrière, votre vue de jeune homme vaut mieux que la mienne ; indiquez-moi donc le nombre et la capacité des vaisseaux à mesure qu’ils apparaîtront.

En ce moment toutes les voiles étaient en vue.

— Les premiers sont des vaisseaux de haut-bord, répondit Bienville. L’amiral est en tête, et je crois qu’il se dispose à jeter l’ancre, vu qu’il serre déjà ses premières voiles.

— Est-ce bien l’amiral qui vient le premier ?

— Oui, monsieur le comte. Je reconnais parfaitement son pavillon qui flotte au grand mat. Je crois même qu’il a jeté son ancre, car il me semble que les voiles de perroquet battent les mats et que la frégate commence à éviter.

En effet la marée montante faisait déjà tourner le vaisseau amiral sur lui-même, et M. de Frontenac, à l’aide de sa longue-vue, put distinguer un groupe