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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

en raison du mauvais accueil qu’il recevait des siens, rêvait dans l’ombre à de cruels projets de vengeance. Mais bien que sa haine fut vouée à tous les habitants du Canada, elle s’acharnait de préférence sur ceux qui l’avaient vaincu et fait captif, c’est-à-dire aux Québecquois, qui composaient en partie l’expédition de Schenectady.

Aussi, dès qu’il apprit que l’on armait une flotte à Boston pour s’emparer de Québec, rumina-t-il un projet qu’il s’empressa de mettre à exécution.

Quelques heures lui suffirent à préparer ses armes, et, trois jours après son arrivée, Dent-de-Loup ressortait de son village d’un pas leste et fier comme au temps d’autrefois.

— Où va donc mon frère Dent-de-Loup ? lui demanda le chef qui l’avait supplanté, et se trouvait sur son passage.

Dent-de-Loup lui lança un regard chargé de mépris et lui montrant son costume et ses armes :

— Mon frère a-t-il des yeux pour ne point voir, dit-il en passant outre.

Quelques jours après, un Iroquois de haute taille, secouait la poussière de ses mocassins aux portes de Boston.

— Je veux voir un des chefs blancs qui vont porter la guerre au Canada sur leurs grands canots, dit-il en mauvais anglais au premier passant qu’il rencontra.

Celui auquel il s’adressait était un soldat nouvellement enrôlé pour l’expédition de Québec. Il conduisit le sauvage chez le lieutenant qui l’avait engagé dans sa compagnie ; car il était plus facile au lieutenant qu’au soldat de présenter l’indien aux officiers supérieurs.