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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Et notre homme s’endormit en faisant des rêves d’or.

Le matin, après avoir tout rangé dans sa boutique, — madame Boisdon ne s’occupait que du pot-au-feu et de son intéressante famille, et trônait au second étage où elle régnait en souveraine absolue, — le cabaretier prit, sur les dix heures, le chemin du château.

Il avait ostensiblement sous le bras une bouteille de vin blanc de Grave, et dans la poche droite de ses braies deux petits objets qu’il y avait enfouis secrètement.

Ainsi qu’au jour précédent, Boisdon s’en alla droit à la cuisine ; mais cette fois Saucier était absent de son office.

Alors, sous prétexte de voir le maître d’hôtel, au sujet de son vin, Boisdon laissa la cuisine et s’engagea dans le même corridor qu’il avait parcouru la veille.

Habitués à de fréquentes visites de sa part, les gâte-sauce ne prêtèrent aucune attention à ses mouvements et le laissèrent aller où bon lui semblait.

Notre homme savait plus d’un tour. Il passa devant la sentinelle qu’il reconnut avec une grande satisfaction intérieure, et salua d’un air affairé. Le soldat le voyant passer outre lui demanda s’il ne voulait pas voir le sauvage.

— Apparemment que mon vin a été bien apprécié et que l’on désire y goûter encore, se dit Boisdon. Non, répondit-il ensuite au soldat ; pas à présent, du moins, car j’ai affaire au maître-d’hôtel.

Et il tourna le corridor d’un pas pressé.

Un quart-d’heure après, Boisdon revint, causa de choses indifférentes avec le militaire, et ne parut céder qu’à ses instances pour jeter un coup d’œil dans la chambre du captif.

Enfin la porte s’ouvrit et l’heureux avare, répétant