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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Marie-Louise secoua sa belle tête d’un air de doute, ce qui fit s’échapper de son œil cette larme que nous y avons aperçue.

François l’ayant vue glisser sur la joue subitement pâlie de la jeune fille, puis retomber sur sa main mignonne et potelée, saisit les doigts rosés de son amante, et les portant à ses lèvres, il but dans un long baiser, cette première larme que l’amour jetait entre eux.

— Que voulez-vous, mon amie, reprit-il en caressant la jeune fille du regard, le soldat se doit à son pays et à son roi. Est-ce que vous me voudriez voir quitter le service ?

— Oh ! non, cher fiancé — et Marie-Louise mit ses deux mains dans celles du militaire — oh ! non, François. Car je vous aime tel que vous êtes aujourd’hui, avec votre bravoure, vos beaux faits-d’armes, et cette grande épée que vous portez si bien et qui a déjà fait tant de mal à l’ennemi. Mais pourtant…

— Voyons, ne pleurez plus, Louise, ou sinon, je ne vous ferai pas certaine confidence que j’avais réservée pour la fin de la soirée.

— Oh ! dans ce cas, c’est fini, dit-elle en imprimant à sa tête un de ces mouvements coquets dont les seules femmes ont le secret. Eh ! dites donc ?

— C’est que je veux vous voir porter mon nom, aussitôt que nous aurons repoussé l’Anglais ; ce qui, à mon avis, ne prendra pas plus qu’une quinzaine.

— Dieu ! quel bonheur !

Et elle détourna un peu la tête pour dissimuler la rougeur que cet aveu inattendu faisait monter à ses joues.

Mais, soudain, ses yeux s’arrêtent avec effroi sur une fenêtre de la cuisine qu’elle peut apercevoir de la