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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

d’argent[1] à nos deux amis, jetons un rapide regard dans la maison pour nous y reconnaître au besoin.

Le rez-de-chaussée où se tenaient les jeunes gens était divisé en quatre appartements : d’abord, à droite et sur l’entrée, se trouvait la cuisine — mal placée, n’est-ce pas ? je n’en peux mais, c’était le goût du temps. — Tout à côté, venait une grande salle avec vaste cheminée près de laquelle se serrent nos nouvelles connaissances, pour se chauffer au feu joyeux qui y prend grandement ses ébats. Cette chambre n’a pour tous meubles qu’une table, quelques chaises, un tapis fait dans le pays, deux armoires enfouies dans le mur, et que Mlle d’Orsy en les entr’ouvrant, il n’y a qu’un instant, nous a montrées bien remplies de la proprette vaisselle de la maison. Vous voyez ensuite à gauche, la chambrette de la jeune fille, petit nid de colibri, aux frais et coquets rideaux, au lit mystérieux et blanc comme l’oiseau qui s’y blottit chaque soir. Enfin, la chambre de Louis, avec fusils, épées, pistolets et baudriers aux murailles.

On avait ménagé au grenier une chambre pour la servante de la maison, bonne vieille femme qui avait bercé les deux enfants sur ses genoux, et voulait finir ses jours avec eux.

Mais pardon, lecteurs, je m’aperçois que dans le premier moment de l’excitation produite par l’arrivée de Bienville, j’ai oublié de vous présenter Louis d’Orsy, maître de céans. Ce dernier, qui peut avoir comme vingt-cinq ans, est brun, grand, robuste, joyeux d’humeur, vaillant soldat et bon officier.

  1. Les verres à boire étaient alors fort peu en usage dans la Nouvelle-France ; et les familles à l’aise se servaient de coupes ou de gobelets en argent massif. Dans les nobles et riches familles de France, le gobelet était d’or et gravé aux armes du maître.