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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

plante n’avait manqué ni d’air ni de soleil : c’est-à-dire, en un mot, qu’elle ne ressemblait pas à la plupart de nos jeunes beautés d’aujourd’hui, celles des villes, du moins, que l’air malsain des cités et l’atmosphère homicide des salles de bal, rendent si pâles et diaphanes à l’âge qu’avait notre héroïne.

Mille pardons aux dames, mes lectrices, qui croiraient me voir faire le portrait d’une paysanne.

La richesse des contours et des formes n’excluait pas, chez Mlle d’Orsy, cette délicatesse aristocratique si exagérée pourtant par certains romanciers français. D’abord, l’animation de son teint qui annonçait de suite un sang riche et vivace, ne faisait que mieux ressortir la blancheur de sa peau. Ensuite, une blonde et abondante chevelure encadrait cette figure charmante et laissait retomber quelques boucles soyeuses sur ses épaules parfaitement arrondies ; tandis que ses yeux d’un bleu de ciel profond pétillaient d’enjouement et d’intelligente candeur, et qu’un sourire, à la fois bienveillant et fier, agaçait continuellement ses lèvres parfaites de couleur et de dessin. Je ne jurerais pas que ce sourire n’eût parfois l’intention de laisser voir les deux plus belles rangées de dents qui soient jamais sorties des mains du Créateur.

Enfin, quand j’aurai dit, pour terminer, que les marquises de la cour du grand roi auraient envié ses mains, que sa taille était souple comme la tige d’un épi que fait ployer le moindre souffle de la brise ; que ses pieds étaient mignons au point de faire se jeter tête baissée, dans le Fleuve-Bleu, la plus aristocratique chinoise du Céleste-Empire, on finira par avouer, sans doute, que Mlle d’Orsy aurait sans peine trouvé des admirateurs dans nos salons les plus fashionables.

Rien de plus naturel chez la fiancée de Bienville