Page:Marmette - François de Bienville, scènes de la vie canadienne au 17è siècle, 1870.djvu/36

Cette page a été validée par deux contributeurs.
39
FRANÇOIS DE BIENVILLE.

les cris. Au second étage, il aperçoit Mlle d’Orsy évanouie près de la porte qu’elle a pu seulement entrebâiller. À la vue du cadavre et de la jeune fille évanouie, Harthing comprend tout, et soulevant Louise, il la dépose sur un méchant grabat qui gît dans un coin de la chambrette.

Jeune encore, quand l’officier sentit entre ses bras cette jeune fille, belle par les charmes de sa figure et par ses dix-sept ans, une bouffée de chaleur lui monta au visage, et les battements de son cœur se firent un instant plus rapides.

Mais il a jeté un coup d’œil autour de la chambre pour trouver quelque cordial propre à ranimer Marie-Louise, et ses yeux ont rencontré, suspendues aux murailles nues et lézardées, une épée avec une croix de chevalier de l’Ordre de Saint-Louis. Alors, malgré la pauvreté du lieu, il reconnaît à ses signes, ainsi qu’à la délicatesse des traits et des mains de la jeune femme, que les habitants de cette misérable demeure, ont dû, sans même remonter bien loin, connaître de meilleurs jours.

Puis il reporte ses regards sur Louise qu’il trouve plus belle encore.

Ne sachant enfin que faire pour la rappeler à elle, il sort et crie sur le palier pour demander du secours, quand il se trouve en face de Louis d’Orsy.

— Vous ici, monsieur Harthing ? lui dit Louis en reconnaissant l’officier pour lui avoir donné des leçons d’escrime.

L’Anglais lui montre de la main la scène de désolation que présente l’intérieur de la chambre.

La réalité s’offre poignante aux regards de Louis qui se jette sur le corps de son père avec des sanglots navrants.