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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Aussi, quand le capitaine du vaisseau marchand voulut tenter l’abordage, comme moyen extrême d’un salut presque inespéré, son équipage était-il à moitié décimé par les projectiles ennemis. Néanmoins, aimant mieux mourir glorieusement que de se rendre, il aborda le corsaire étonné d’une pareille audace et lui jeta ses grappins.

Mais la lutte était trop inégale ; car après vingt minutes de combat, le capitaine français était tué, et les quelques hommes de son équipage qui survivaient, blessés ou prisonniers. M. d’Orsy et son fils, qui s’étaient vaillamment battus tous deux, furent aussi blessés et tombèrent entre les mains des vainqueurs.

Ceux-ci, exaspérés par cette vigoureuse résistance qui leur avait fait perdre plusieurs des leurs, resserrèrent les liens de leurs captifs, et firent main basse sur tout ce qu’ils trouvèrent à bord de la Fortune.

C’est à peine si le pauvre baron put sauver quelques louis d’or qu’il avait sur lui au moment où l’action s’était engagée.

Amenés à Boston, les trois captifs reçurent l’ordre d’y interner ; c’est-à-dire qu’ils étaient libres de leurs mouvements, mais seulement dans les limites de la place dont ils ne pouvaient sortir sans s’exposer aux peines les plus sévères.

Ce genre de captivité se trouvait aussi en usage au Canada, vers la même époque.

Pour comble de malheur, les blessures de M. d’Orsy étaient des plus graves ; et le peu d’argent qu’il avait dérobé à l’avidité des corsaires fut employé à louer un pauvre réduit, et à payer les soins d’un médecin. Celui-ci put guérir aisément le jeune d’Orsy qui n’était pas grièvement blessé ; mais il donna peu de soulagement au baron, chez qui l’excès de ses infor-