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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Il en fut ainsi de celle de Bienville. Quoique son chagrin ne fût plus aussi visible aux yeux de tous, sa pâleur, sa gaîté disparue attestaient que la flamme, pour être moins ardente qu’autrefois, n’en brûlait pas moins toujours dans son sein ; comme la lampe des églises dont la faible lumière survit seule aux illuminations des solennités, et qui, si petit qu’en soit le feu, conserve cependant le principe d’un incendie pour peu qu’une cause imprudente s’en vienne l’activer.

Si Bienville souffrit de passer l’hiver sans guerroyer, ses vœux durent se trouver accomplis lorsqu’au mois de mai mille Iroquois se répandirent dans les environs de Montréal.[1] Ces barbares s’étant livrés à leurs cruautés ordinaires sur les colons et les sauvages chrétiens,[2] on dut s’armer en guerre pour les repousser ou du moins les tenir en échec.

En apprenant que l’un des partis ennemis avait enlevé trente-cinq femmes et enfants de la bourgade iroquoise chrétienne de la Montagne, Bienville qui désirait commander pour être à même de se distinguer d’avantage, poursuivit les ravisseurs à la tête de deux cents Iroquois chrétiens. Ces derniers allaient écraser le parti ennemi qui ne comptait que soixante-dix guerriers, quand les Iroquois de la Montagne reconnaissant des Agniers dans leurs ennemis, jetèrent bas les armes et refusèrent de combattre.[3]

  1. Charlevoix, tome II, p. 94.
  2. « Le premier (détachement des Iroquois) se jeta d’abord sur un quartier de l’Île de Montréal qu’on appelle la Pointe-aux-Trembles, où il brûla environ trente maisons ou granges et prit quelques habitants sur lesquels il exerça des cruautés inouïes. » Charlevoix, tome II, p 94.
  3. Historique. Ce fut dès lors que l’on commença à soupçonner les Iroquois domiciliés d’être secrètement de connivence avec ceux de leur nation que le baptême n’avait pas encore faits nos alliés.