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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Mais ceci doit rester entre Dieu seul et moi. Au cloître où je vais désormais vivre pour mourir, je prierai Dieu pour vous. Il voudra bien m’entendre et vous consoler sans doute ; et, bientôt vous m’oublierez pour en aimer une autre qui saura vous rendre heureux. Adieu ! mon ami, adieu ! pour cette vie du moins !

Des sanglots couvrirent ici sa voix, et elle tendit sa blanche main à Bienville.

Mais de la poitrine haletante du jeune homme sortit un cri de désespoir. Et d’abord il chancela comme un homme ivre.

Si grande était pourtant sa force qu’il comprima soudain cette mer immense de douleur qui venait de combler son âme. S’il ne déborda point ce torrent furieux qui grondait en lui, ce fut grâce à l’énergie plus grande dont Dieu prend soin de gratifier ceux qu’il voue à la souffrance dès leur berceau.

Aussi n’essaya-t-il point de parler, mais d’un pied lourd et vacillant il sortit.

Lorsque le dernier des pas de son fiancé vint résonner à son oreille, lugubre comme le bruit produit par la pelle du fossoyeur sur une tombe aimée, Marie-Louise s’évanouit.