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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

anglaises peuplées, dès lors, de plus de deux cents mille âmes.

La Nouvelle-France était dans la période ascendante de sa gloire. Dieu qui veillait sur la destinée de cette colonie voyait, sans doute, que le vivace élément français n’y était pas encore assez enraciné pour pouvoir y lutter, comme il le sut faire avec succès par la suite, contre les prétentions des races environnantes. Et si plus tard nos pères durent courber un moment la tête sous l’orage, pour la relever ensuite avec orgueil, c’est que la Providence voulait nous sauver des plus grands dangers de la révolution française que Louis XV et sa voluptueuse cour attiraient déjà sur la France au moment de la conquête du Canada par l’Angleterre. Ce n’était que justice, puisque tandis que la société française irritait là-bas le ciel par son luxe et sa démoralisation sous Henri IV, Louis XIII et Louis XIV, les colons de la Nouvelle-France arrosaient de leurs sueurs et de leur sang le sol de leur patrie d’adoption ; pendant que Jogue, Brebœuf, Daniel et Lalemant rachetaient abondamment par leur martyre la petite part de ces fautes qui incombaient à nos ancêtres par suite de leurs rapports de parenté avec la mère-patrie.

La joie des Québecquois fut bien grande quand ils se virent ainsi débarrassés de leurs ennemis. Ils firent, le cinq novembre, une procession où l’on porta en triomphe le tableau de la Sainte-Vierge que l’on avait suspendu au clocher de la cathédrale, et le pavillon de l’amiral anglais ; tandis que les églises et les communautés de la ville exhalaient en chœur de longs cantiques d’actions de grâces.

Pour perpétuer le souvenir de la délivrance de Québec, les citoyens instituèrent une fête sous le nom