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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

faites un peu la cour. Mais, allons ! ne rougissez pas ainsi ; il n’y a rien que de très-louable en ce sentiment-là.

— Allez, Monsieur, ajouta le gouverneur d’un ton plus sérieux en sortant du château, et mettez à profit les quelques heures de répit que l’ennemi nous laisse ; car Dieu seul sait ce que l’Anglais et demain nous réservent. Au revoir !

— Au revoir et grand merci, monsieur le comte, dit François qui descendit à pas pressés l’éminence sur laquelle était assis le château, et se dirigea vers la rue Buade, tandis que le comte de Frontenac et le major Provost s’engageaient dans la rue Saint-Louis.

Ainsi que la nature à la veille des grandes crises, la ville, reposait silencieuse, et les volets de chaque habitation étaient clos de façon à ne laisser passer aucun jet de lumière, si lumière il y avait au dedans. Car on n’aurait pu dire si les habitants de la ville, sommeillaient, ou si le danger prochain qui s’annonçait menaçant les tenait éveillés.

Bienville, dont l’impatience paraissait croître à mesure qu’il avançait, doubla le pas, s’engagea bientôt et disparut dans l’ombre de la rue Buade dont les échos, subitement réveillés, semblaient reprocher à ce passant tardif d’oser troubler ainsi leur repos.