Page:Marmette - François de Bienville, scènes de la vie canadienne au 17è siècle, 1870.djvu/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.
26
FRANÇOIS DE BIENVILLE.

bas du fleuve. Aussi m’embarquai-je immédiatement. Le lendemain, je rencontrai votre second courrier vis-à-vis de Sorel. Les détails circonstanciés qu’il m’apportait ne me laissant plus aucun doute, je renvoyai le capitaine Ramsay auprès de M. de Callières[1], lui ordonnant de faire descendre ici les troupes et la majeure partie des milices. Je donnai les mêmes ordres en passant aux Trois-Rivières, et fis ensuite la plus grande diligence pour arriver ici.

— Les troupes de Montroyal et des Trois-Rivières, doivent-elles vous suivre de près, monsieur le comte ?

— J’espère qu’elles seront ici demain, pourvu, toutefois, qu’il ne leur arrive aucun accident qui les retarde. Car alors, tout serait fini ; c’est-à-dire qu’il nous faudra mourir, puisque nous sommes à peine, dans la ville, deux cents hommes en état de porter les armes.[2] Mais, n’importe, s’écria le noble vieillard en se levant dans un moment d’enthousiasme, nous périrons à notre poste, et le bruit de notre agonie traversant les mers, s’en ira dire à notre France que les frimas du Canada ne glacent point le sang de ses enfants.

Je puis compter sur tous ; et avec des officiers comme vous, Messieurs, les soldats ne peuvent qu’être braves.

Oh ! à propos, monsieur de Bienville, votre belle conduite à la baie d’Hudson, où vous vous êtes distingué comme volontaire, a attiré toute mon attention sur vous ; aussi laissez-moi vous récompenser, en quelque sorte, des services que vous y avez rendus à la France et au Canada, en vous nommant enseigne de la compagnie de marine commandée par votre

  1. Alors gouverneur de Montréal.
  2. La Hontan Lettre XX, 1691.