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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

À peine le nuage de fumée que vient de faire cette décharge s’est-il dissipé, que les trois frères LeMoyne se sont relevés en criant :

— En avant :

Qu’il était beau de voir ces deux cents braves chargeant douze cents ennemis !

Dent-de-Loup qui peut croire que l’heure de la vengeance a sonné enfin pour lui, ne tue pas au hasard ; c’est sur les officiers que son mousquet se braque de préférence. Loin de tirer avec les Anglais quand ceux-ci ont fait leur décharge inutile, le sauvage a réservé son coup de feu ; et quand les français se relèvent, il ajuste froidement M. de Longueuil.

Celui-ci, qui court à la tête de son bataillon, n’est plus qu’à dix pas, lorsque la mousquetade de Dent-de-Loup le vient frapper au côté gauche où il porte la main en chancelant.

Un hurlement de rage parcourt les rangs de ses soldats. Mais quelle n’est la joie de tous quand ils voient leur capitaine se relever sain et sauf et leur dire :

— Ce n’est rien, mes enfants ! sus à l’Anglais !

La corne à poudre de M. de Longueuil a reçu et amorti le coup puis fait dévier la balle.[1]

— Damné sauvage ! s’écrie Bras-de-Fer, il faut en finir avec toi !

Et trois énormes enjambées le mettent en face de l’Iroquois. Ce dernier lui porte un furieux coup de casse-tête. Bras-de-Fer dont le mousquet est aussi déchargé, s’en sert pour parer le coup, et, prenant

  1. « Le sieur de Longueuil fut frappé au côté, et aurait été tué, si sa corne à poudre n’eût amorti le coup. » M. Ferland, tome II, p. 226.