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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

descendre tranquillement jusqu’à la rue, il rejoignit sans peine le canot de Dent-de-Loup ; car il était tombé en dehors de la barricade.

Le bruit de sa chute avait cependant attiré l’attention des gardes du retranchement de la rue Sault-au-Matelot ; ce fut alors qu’ils allumèrent des torches pour examiner les abords du cap.

Craignant d’être découvert, Harthing avait traîné jusqu’à l’eau la pirogue, et donnant quelques coups d’aviron, il s’était arrêté à vingt pieds du rivage afin d’attendre Dent-de-Loup.

Lorsque ce dernier eut pris position dans son canot, il était temps de songer à la fuite ; car les soldats du guet, bientôt revenus de l’étonnement où le brusque passage du Chat-Rusé les avait d’abord jetés, s’étaient lancés à sa poursuite.

— Vite ! au large ! dit Harthing à son compagnon, en les entendant accourir vers la grève.

Les deux avirons plongent dans la rivière et lancent en avant la légère pirogue.

Plusieurs coups de feu partent du rivage à leur adresse, et quelques balles passent non loin des deux fugitifs ; ceux-ci répondent à cette décharge par un cri de défi qui roule sinistre sur les eaux noires, et ils disparaissent aux yeux des Canadiens dans l’épaisse nuit.

Mais il n’ont pas encore atteint le milieu de la rivière que Harthing sent ses pieds tremper dans l’eau.

— Que diable est ceci ? dit-il à Dent-de-Loup.

— Oah ! fait le sauvage en éprouvant la même sensation d’humidité.

L’eau monte dans l’embarcation et les deux hommes en ont bientôt par dessus la cheville du pied.