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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

bout que ces maudits importuns nous auront à peine dépassés !

Une effroyable contraction étreignit le cœur de ces trois hommes obligés de rester exposés au feu de la terrible mine qui allait éclater à cent pieds d’eux. La fusée adaptée au baril devait embraser la poudre en cinq minutes ; et il y en avait au moins trois d’écoulées depuis que Dent-de-Loup l’avait allumée.

— Oh ! puisqu’il faut périr avant que d’être heureux, se dit Harthing, je vais lui donner au moins le baiser des fiançailles de la mort !

Et ses lèvres en feu pressent avec force la bouche glacée de Marie-Louise évanouie.

En ce moment quinze hommes armés venant de la basse ville passaient devant eux.

Au même instant aussi, un boulet frappe la muraille contre laquelle Harthing, Dent-de-Loup et Boisdon se serrent avec frayeur ; le projectile tombe à dix pas d’eux et les couvre de fragments de pierre dont plusieurs blessent Boisdon.

— Sainte-Vierge-Marie ! je suis mort ! hurle l’hôtelier qui écarte violemment le sauvage pris au dépourvu, bondit sur ses jambes et s’élance en courant vers la rue Buade, avec la frénésie aveugle de la terreur. Il ne voit, il n’entend rien ; mais il court avec l’emportement furieux d’un cheval qui a pris le mors aux dents.

Aussi va-t-il donner au beau milieu de la patrouille. Boisdon bouscule un soldat qui se trouve sur son chemin et continue sa course effrénée vers la cathédrale.

— Sacrebleu ! qu’est-ce là ? s’écrie le soldat renversé par l’aubergiste.