Page:Marmette - François de Bienville, scènes de la vie canadienne au 17è siècle, 1870.djvu/174

Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
FRANÇOIS DE BIENVILLE.

corps-de-garde une maison avoisinante ; et, tandis que les autres reposaient, un factionnaire veillait sur la barricade.

— Par les cinq cent mille diables ! se dit Harthing, tous les obstacles vont donc surgir devant moi au moment même où le succès paraissait me sourire ! Est-ce un dernier avertissement que m’envoie le ciel ? Oh ! qu’importe alors, car si je risque tout, l’enjeu en vaut la peine !

— La tanière des loups est difficile à approcher, murmura le Chat-Rusé à son oreille.

— N’y a-t-il pas quelque moyen de passer ?

— Un seul ; mais j’ai bien peur qu’il ne nous soit funeste, si les bons manitous nous sont contraires.

— Peste soit de tous les manitous passés, présents et futurs ! pensa le lieutenant. Et s’adressant au sauvage :

— Je suis prêt, dit-il ; tentons le destin !

— Que mon frère me suive, alors, lui répondit l’Iroquois.

Et il rétrograda d’une vingtaine de pas, puis grimpant sur le flanc du cap, il fit un détour afin de passer au dessus de la barricade.

La pente du roc en cet endroit est très rapide ; aussi se figurera-t-on le danger que couraient les deux aventuriers. Car Harthing suivait intrépidement Dent-de-Loup, s’accrochant comme lui à toute saillie de rochers qui se rencontrait sous sa main, se cramponnant aux arbustes et aux racines qui semblaient quelquefois céder sous la pesanteur du poids de ceux qu’ils retenaient suspendus à vingt-cinq pieds au dessus de la rue.

Deux fois l’Iroquois, qui ne perdait pas de vue la sentinelle, crut remarquer que le bruissement des