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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

— Combien d’hommes avez-vous perdus ? demanda M. de Maricourt, après un assez long silence.

— Oh ! pas beaucoup, mon capitaine. À part M. de Clermont et M. de Latouche, nous n’avons eu que dix à douze blessés.[1]

— Connait-on les pertes de l’ennemi ?

— Oui, mon capitaine ; quelques coureurs des bois que M. de Longueuil avait envoyés sur le champ de bataille pendant qu’on revenait vers la ville, nous ont rejoints comme on y rentrait. Ils disent qu’il y a « cent cinquante ennemis[1] sur le carreau, depuis le camp des Anglais jusqu’au lieu où ils ont débarqué. »

On entendit en ce moment le bruit des pas d’une patrouille qui s’avançait vers le quai. On échangea le mot d’ordre, et il se trouva que les arrivants étaient chargés d’apporter des vivres à la compagnie. M. de Frontenac envoyait aussi un officier pour commander le poste durant l’absence des chefs laissés libres d’aller prendre quelques heures de repos.

Bienville qui, tout le jour, avait conçu mille inquiétudes au sujet de Marie-Louise, reprit avec empressement, mais seul, le chemin de la haute ville. Car MM. de Maricourt et d’Orsy restaient quelques instants de plus sur le quai pour présider au partage des rations et donner leurs instructions à l’officier chargé de les remplacer.

De noirs pressentiments serraient le cœur de François ; il lui semblait qu’un malheur menaçait sa fiancée. En effet, la lettre de John Harthing n’était pas de nature à rassurer Bienville. Aussi se dirigea-t-il en grande hâte vers la demeure de Louis d’Orsy.


  1. a et b Archives de Paris, lettre de Monseignat.