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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

qu’on s’est joliment escrimé là-bas ; joint à cela que…

C’est bon ! c’est bon ! bavard, interrompit M. de Maricourt. Mais il n’est rien arrivée de fâcheux à mon frère M. de Longueuil ?

— Non, Dieu merci. Mais ce pauvre M. de Clermont !…

— Comment ! qu’entends-tu dire ? s’écrièrent à la fois tous ceux qui étaient présents.

— Atteint d’une balle et mort à mon côté !

— Mort ! répétèrent les assistants sur tous les tons d’une émotion douloureuse.

Tandis que cette nouvelle frappe désagréablement tous les auditeurs, donnons quelques détails sur Bras-de-Fer, et les motifs qui lui ont fait quitter sa compagnie durant la journée.

Pierre Martel, surnommé Bras-de-Fer, avait trente-cinq ans, six pieds et plus de haut, un physique assez agréable avec une langue des mieux pendues. Sa figure sympathique et placide annonçait plutôt la bonté que nulle autre chose. Aussi les malins disaient-ils, mais bien bas, que Pierre était plus fort des bras que de la tête ; ce qui n’empêchait pourtant pas qu’il avait, lors d’une rencontre avec les Iroquois, reçu en plein crâne un coup violent de tomahawk lequel avait rebondi et glissé sur l’os, ne laissant d’autre marque de son passage qu’une grande balafre qui descendait en séparant les chairs jusqu’à l’œil gauche. Voilà probablement ce qu’aurait répondu Pierre à celui qui aurait osé lui laisser entrevoir la différence qui pouvait exister entre la force de sa tête et celle de son bras.

Car notre homme ne se fâchait pas aisément. La colère était si profondément enfouie dans ce robuste