Page:Marmette - François de Bienville, scènes de la vie canadienne au 17è siècle, 1870.djvu/156

Cette page a été validée par deux contributeurs.
159
FRANÇOIS DE BIENVILLE.

direction de la rivière Saint-Charles. Ne sont-ce pas des feux de bivouac qu’on allume là-bas, sur les hauteurs de la Canardière, et à mi-chemin entre Beauport et la ville ?

— Eh ! vive Dieu ! tu as raison, Bienville, répond d’Orsy.

En effet, plusieurs feux, rapprochés les uns des autres, semblaient jaillir successivement des hauteurs de la Canardière ; et de dix qu’ils étaient tout d’abord, il y en eut bientôt vingt, cinquante, puis enfin cent et plus.

— Alors, les Anglais sont campés là, reprend Bienville ; car les milices de Beauport ont dû regagner leur village ou retraiter vers la ville avec les hommes de M. de Longueuil. D’ailleurs, ceux-ci seraient-ils réunis, ce grand nombre de feux leur serait inutile. Mais je m’étonne de ce que mon frère[1] et ses hommes ne soient pas encore de retour.

En ce moment, un roulement de tambours, d’abord éloigné, mais se rapprochant de plus en plus, frappe l’oreille des officiers.

— Ce bruit vient, je crois, du Palais, [2] dit le capitaine. Alors, ce sont nos gens qui reviennent du combat ; et nous aurons bientôt des nouvelles par Bras-de-Fer.

Le roulement des tambours se rapprochant de plus en plus, on put distinguer bientôt un air sémillant joué par quelques fifres qui les accompagnaient en jetant leurs rires aigus au vent du soir.

  1. M. le baron de Longueuil était le fils ainé de M. Charles LeMoyne, lieutenant du roi de la ville et gouvernement de Montréal, et conséquemment frère de Maricourt et de Bienville.
  2. Ce quartier de notre ville tire son nom de l’ancienne résidence ou « Palais » des intendants français, dont on peut voir encore les ruines séculaires dans l’enceinte du Parc.