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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

d’animation dans le teint. Si enfin, tenant vos doigts mignons et roses, dans sa main nerveuse et dure, cet homme, frère de héros et héros lui-même, vous eût dit : « Je vous aime, » peut-être alors, Mademoiselle, aurait-il pris un extérieur plus séduisant à vos yeux, et n’auriez-vous pas retiré votre main tremblante de celle du galant guerrier.

La famille de François LeMoyne de Bienville était originaire de Normandie. Le père de notre héros, Charles LeMoyne, qui avait brillé au premier rang dans nos luttes, alors si fréquentes, avec les Iroquois, avait eu onze fils et deux filles. Cinq des premiers moururent au champ des braves, après avoir étonné leurs contemporains par leur courage toujours indomptable, et par leurs merveilleux faits d’armes qu’un glorieux trépas a si dignement couronnés.

M. de Bienville, quatrième fils de Charles LeMoyne, avait déjà, dès l’époque où nous sommes, la réputation bien méritée d’un vaillant soldat et d’un bon officier. Il avait, l’année précédente, fait plus que ses preuves à la baie d’Hudson, où il avait rivalisé d’audace avec ses frères.

Il était à peine revenu de ces froides contrées, et se trouvait à Montréal, quand M. de Frontenac, qui s’y était aussi rendu pour s’opposer à l’invasion de terre tentée par Winthrop, ce dont nous parlerons bientôt, ayant été rappelé à Québec par l’approche d’une flotte anglaise, lui avait demandé de descendre à la capitale en sa compagnie. Comme le sieur de Bienville flairait de loin la poudre, haïssait mortellement l’Anglais, et se trouvait bien partout où il y avait de glorieuses estocades à donner — quitte à en recevoir en échange — il avait accepté avec joie, et s’était aussitôt embarqué avec le comte, qui l’affectionnait particulièrement.