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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

à se transporter de ce côté-ci de la rivière Saint-Charles, où il aurait donné contre elles avec ses forces, alors que la marée haute eût enlevé toute chance de fuite aux ennemis. De la sorte, ceux qui auraient échappé aux balles françaises n’auraient guère pu se préserver d’un bain forcé non moins dangereux.

Aussi le gouverneur n’envoya-t-il à leur rencontre, lorsqu’ils prirent pied à la Canardière, le 18 octobre, que trois cents hommes choisis parmi les troupes de Montréal et que M. de Longueuil devait commander.

Du côté de Beauport, M. Juchereau de Saint-Denis, le seigneur du lieu, devait inquiéter les Anglais avec les soixante miliciens, ses censitaires, que, malgré son grand âge, il dirigeait en personne.

Nous verrons bientôt comment le major Whalley[1] fut reçu avec ses quinze cents hommes par les trois cent soixante Canadiens. Suivons pour le moment cinq gros vaisseaux anglais, qui, l’amiral en tête, s’avancent formidables vers la ville.

Il pouvait être deux heures de l’après-midi lorsqu’ils jetèrent leurs ancres pour s’embosser[2] devant Québec.

Suivirent quelques minutes employées à carguer les voiles. Et, soudain, d’innombrables jets de flamme bondirent hors de leurs sabords, comme autant de longs serpents de feu.

Au même instant, nos remparts et nos quais se couvrirent à leur tour de flamme et de fumée, tandis que de formidables détonations s’entrechoquaient dans l’air qu’elles faisaient vibrer d’un fracas sourd et terrible.

  1. C’était le commandant des troupes anglaises.
  2. Un vaisseau est embossé lorsqu’il a jeté deux ancres l’avant et à l’arrière, pour résister au flot et au vent et se servir ainsi plus aisément de son artillerie en présentant le flanc.