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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

— Sans vouloir vous espionner, continue Louis, j’ai entendu vos propositions avec le juste refus qu’elles vous ont attiré ; et je confirme ce que vous a dit ma sœur. Maintenant, monsieur, vous savez ce qu’il vous reste à faire.

Harthing s’était relevé ; il était là, le front haut, pâle comme un linceul, les mâchoires contractées et l’œil en sang.

— Oh ! enfers ! cria-t-il enfin, éperdu, haletant. Je n’avais jamais daigné descendre jusqu’à l’amour… Il me semblait indigne d’un homme de guerre de perdre son temps aux genoux d’une femme… Et maintenant que j’en suis venu à mendier le regard d’une enfant, voilà que cette enfant se rit de moi comme du dernier des bourgeois !

Il se dirigeait déjà vers la porte, quand il se retourna soudain, sombre comme le génie du mal, en s’écriant :

— Marie-Louise d’Orsy… je fais le serment de prendre une éclatante revanche… un jour… tôt ou tard… Au revoir Louis d’Orsy !

Et la fureur du malheureux était si grande qu’elle ne pouvait plus tenir sous le toit des d’Orsy. Il lui fallait de l’espace, et il quitta, pour n’y plus rentrer, cette demeure qui l’avait vu tant aimer et souffrir.

Quand Louis eut fini ce récit que nous avons complété dans les détails qu’il devait nécessairement ignorer, Bienville, qui était devenu plus sombre encore, repartit :

Je conçois maintenant le ton de sa lettre. C’est celui d’un homme qui, n’ayant plus rien à espérer par voie de persuasion, veut essayer les moyens violents pour voir s’ils ne lui réussiront pas mieux.