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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

Louis sans défiance se rendit aisément à ces raisons spécieuses en elles-mêmes, et consentit à recevoir ainsi chez lui l’officier quatre fois la semaine.

Les sévères vêtements de deuil que portait Marie-Louise, donnaient encore plus de relief à la pureté de son teint ainsi qu’à la distinction peu commune de ses traits.

Aussi, durant les quelques semaines qui suivirent, le malheureux Harthing sentit sa passion s’accroître de plus en plus ; tandis que la blessure qu’elle lui causait devenait de jour en jour plus cuisante, à mesure qu’il voyait combien peu Marie-Louise paraissait faire attention au brillant officier.

Les leçons que Louis donnait au lieutenant avaient lieu le soir ; et, pendant tout le temps qu’elles duraient, Marie-Louise, assise à l’écart, se livrait à des travaux d’aiguille sur lesquels ses yeux restaient obstinément arrêtés, tandis que l’officier lui jetait de temps à autre un long regard à la dérobée.

Mais n’importe ; il la rencontrait assez souvent pour se dire qu’un jour viendrait peut-être où la jeune beauté s’apercevrait enfin d’une admiration aussi constante que respectueuse. Ensuite, il la voyait presque chaque jour ; que lui importait l’avenir. Et il était loin de penser qu’une brusque séparation pourrait bien mettre un terme à ces douces entrevues.

Il vint pourtant ce jour ; ce fut lorsque Louis et sa sœur, après avoir reçu de France la nouvelle de la mort et l’héritage de leur tante, purent payer leur rançon et se préparer à passer en Canada. Mais Harthing ignora tout presque jusqu’au dernier moment ; car Louis ayant ses raisons pour ne point admettre un étranger dans la confidence de ses démarches intimes et de ses projets d’avenir, n’en avait