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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

part à la conversation des deux amants, et partant de les laisser causer tout à leur aise.

Cependant la question de sa sœur lui fit lever la tête, et il répondit tranquillement :

— Je lui ai dit que la vue de Harthing est la cause du cri que tu as jeté lors de son passage.

— Tu aurais bien dû…

En ce moment on frappa deux coups secs à la porte.

— Qui diable, peut venir à cette heure ! dit Louis. Et il alla ouvrir.

— Est-ce bien ici la demeure de M. Louis d’Orsy ? demanda quelqu’un du dehors.

Telle était l’obscurité que Louis distingua seulement l’ombre d’un homme, le nez dans son manteau et le feutre tiré sur les sourcils.

— Oui, monsieur, répondit Louis.

— Alors, veuillez remettre cette lettre à Mlle d’Orsy, reprit l’inconnu qui mâchonna ces mots, fit un pas en avant et tendit à Louis la missive. Mais la lumière qui éclairait l’intérieur de la maison, vint, par le mouvement qu’il fit, frapper le messager à la figure ; et malgré la précaution que ce dernier avait prise de se voiler le visage d’un pan de son manteau, Louis entrevit assez son homme pour le reconnaître plus tard, quand la marche des événements lui indiqua que cet individu était Jean Boisdon.

Aussitôt qu’il se fut acquitté de son message, le porteur ne se fit point prier pour tourner les talons et disparaître dans la nuit.

— Une lettre pour toi, dit Louis en tendant à sa sœur une missive cachetée d’un grand sceau de cire rouge.

— Pour moi !… Mon Dieu ! qui peut m’écrire ainsi ! Mais cette écriture est d’un homme !