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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

à la haute ville. Clermont eut beau se défendre sur sa blessure, rien n’y fit ; et après avoir bandé sa jambe, tant bien que mal, il lui fallut suivre ses amis à la hauteur de leur triomphe. Et les enthousiastes porteurs se dirigèrent en acclamant vers la côte de la Montagne.

Le véritable triomphateur était cependant François Bienville. Fièrement drapé dans le pavillon anglais, les bras croisés sur sa forte poitrine, il semblait se dire que ces honneurs ne lui étaient que justement dus. Aussi jetait-il un regard assez calme sur la foule de militaires, de bourgeois, de femmes et d’enfants, qui se pressaient sur son passage en le saluant de mille joyeux vivat. Car le Français brave et glorieux par excellence, n’est jamais étonné des honneurs de la victoire.

À l’entrée de la rue Buade, M. de Frontenac, qu’on avait mis au courant des hauts faits des trois Canadiens, s’en vint au devant d’eux.

— Bien ! messieurs ! très-bien ! s’écria le gouverneur en les apercevant. Ces Anglais fussent-ils dix mille, avec cinq cents hommes comme vous à mes côtés, je ne les crains pas.

— Vive monsieur le comte ! Vive Bienville ! Vive la France ! vociféra la foule qui encombrait la place.

Bienville détourna la tête pour cacher l’émotion qui le gagnait. Il aperçut alors, Marie-Louise qui le regardait de sa fenêtre ; elle applaudissait de ses mains mignonnes, tandis que deux larmes de bonheur glissaient sur ses joues rosées.

Ces doux pleurs de sa fiancée lui allèrent au cœur, et, saisi d’une indicible émotion, il déroula vivement le drapeau qu’il avait négligemment jeté autour de