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FRANÇOIS DE BIENVILLE.

l’ensemble de sa physionomie un air bien spirituel, mais très-impératif.

Aussi n’aurez-vous nulle raison d’être surpris, si je vous dis que le comte exigeait l’obéissance la plus ponctuelle chez ses subordonnés. Quand il avait commandé, il fallait se soumettre ; sinon, l’orage éclatait. Les démêlés qu’il eut, lors de son premier gouvernement, avec M. Perrot, l’abbé Fénelon et l’intendant Duchesnau, sont là pour le prouver. Vous avouerez cependant avec nous que les deux premiers n’étaient pas sans avoir tort, puisqu’ils furent rappelés tous deux en France, où le roi logea Perrot à la Bastille, tandis qu’il défendait à M. l’abbé Fénelon de remettre les pieds sur nos rivages.

Mais ce fut bien pis lorsque l’intendant se fut mis en guerre ouverte avec lui. Le vieux gentilhomme qui avait eu, dit on, un roi (Louis XIII) pour parrain, et la discipline militaire pour tutrice — il n’avait que dix-sept ans quand il entra dans l’armée — voulut se roidir contre les récalcitrants, et punir à tout prix leurs refus répétés d’obéissance. Alors, l’intendant porta jusqu’au pied du trône ses plaintes et celles du parti qui le soutenait — plaintes plus ou moins fondées — et les deux adversaires furent rappelés en France en 1682.

La colonie s’était bientôt ressentie de la perte qu’elle venait de faire en la personne de ce gouverneur. Les temps étaient des plus difficiles à cette époque, et il fallait un homme de talents et d’énergie pour faire face aux circonstances.

En effet, la molle et malheureuse administration de MM. de La Barre et de Denonville, avait bientôt mis la Nouvelle-France à deux doigts de sa perte. Mais Louis XIV, qui se connaissait en hommes, renvoya le