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charles et éva

empreint d’une profonde tristesse. Charles respectant son silence, était adossé à un arbre ; les bras croisés sur la poitrine, les yeux fixés sur la jeune fille ; il avait l’air bien attristé lui aussi. À quoi songeait-il ? Je ne saurais le dire. Toujours est-il qu’il était tellement absorbé dans ses pensées qu’il ne fut tiré de sa rêverie que lorsque la triste cérémonie terminée, on vint lui demander quelles devaient être les sentinelles pour la nuit.

Ayant alors donné ses ordres à ce sujet, et vu qu’Éva se retirait sous une hutte préparée pour elle, il jeta quelques brassées de bois dans un feu allumé à une dizaine de pieds du nid de colombe de la jeune fille, se roula dans une peau de bison et se coucha non loin du brasier. Longtemps il regarda la flamme consumer le bois ; longtemps il suivit des yeux les parcelles lumineuses qui s’en échappaient pour aller s’éteindre dans l’air. Bientôt, le pétillement du feu et les brillantes étincelles (images du bonheur qui passe aussi vite qu’elles) tout se confondit pour lui ; et il tomba insensiblement en cet état qui fait oublier au malheureux ses peines et à l’heureux son bonheur.