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teur auprès du mourant, celui-ci, bien qu’ayant toute sa connaissance, n’avait point adressé la parole à la jeune fille. Il s’était renfermé dans un mutisme absolu, paraissant aussi indifférent à ceux qui l’entouraient, qu’insensible à la mort dont l’haleine glacée faisait déjà frissonner ses membres.

Levant enfin les yeux sur Éva :

— Ma sœur, la vierge pâle est bonne, dit-il d’une voix faible. L’Aigle-Noir croyait qu’elle le haïssait.

— Ma religion me défend de haïr, répondit celle-ci ; et si mon frère connaissait et pratiquait cette religion, il ne parlerait pas ainsi.

— L’Aigle-Noir a été instruit dans la prière des robes noires[1] ; mais il est bien méchant, et il a oublié la prière des visages pâles.

— Croyez-vous que cette religion soit bonne ?

— Le Grand-Esprit parle par la bouche des robes noires, et la prière qu’ils enseignent est la véritable, répondit le blessé

  1. Nom par lequel les Sauvages désignent les prêtres. (Note de l’auteur.)