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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

sens et l’imagination perçoivent le choc d’une image tragique, vont répétant avec un naïf orgueil :

— Chez nous, ce n’est pas comme en France ; nous avons fait notre révolution sans presque verser de sang !

Et quelqu’un d’ajouter, conciliant :

— Vous savez… la Révolution française… il y a déjà plus d’un siècle… Les gens sont plus civilisés à présent.

Mais, en faisant entrer en jeu la civilisation actuelle, aucun de ces hommes ne songe à tourner ses regards vers l’Allemagne assassine obligeant, le progrès humain à se faire le complice du meurtre et de la ruine, à ramener sa pensée sur les ruines de Liège, d’Ypres, de Louvain ou de Reims, la deux fois sacrée, — par l’histoire et par le malheur !

Il n’est pas rare d’entendre au coin d’une rue, dans un magasin, quelque Russe plus instruit ou quelque Français blessé dans sa fierté nationale, exposer avec calme ou développer avec des gestes véhéments ce que fut la Révolution française, génératrice de toutes celles du présent et de l’avenir. Et, pendant ce temps, plus éloquent que toutes les paroles,