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LA RÉVOLUTION RUSSE

dont le dévouement de typographes bénévoles assure la quotidienne apparition. Entre autres choses, il publie la renonciation de Michel Alexandrovitch au trône de Nicolas II, son frère. La nouvelle en était déjà connue, mais on lit le texte et on le commente avec une satisfaction visible. À peine né à la liberté, le peuple russe va d’un bond jusqu’au point extrême de ses exigences. Il est pareil à ces gaz dont la violence d’explosion est en proportion de leur degré de compressibilité. Une bonne et durable constitution lui paraissait, il y a quinze jours à peine, un idéal inespéré. En une semaine, la révolution a projeté ses désirs bien au delà. Il se délecte, il s’enivre aux syllabes, nouvelles pour lui, du mot respoublika, et c’est déjà la république sociale qu’il lui faut.

— La Révolution française ? disent avec une moue un peu dédaigneuse ceux qui la connaissent mal. Il en est sorti une nation de bourgeois. Nous ferons plus vite et mieux !

D’autres, qui n’ont retenu du grand mouvement libérateur émané de la France que le côté sanglant, comme des enfants dont le cerveau reste fermé aux idées, mais dont les