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LA RÉVOLUTION RUSSE

de fuir dans la rue par le grand escalier.

Pendant ce temps, la troupe armée frappe à la porte de la cuisine, à coups de crosses de fusils. Des voix menaçantes crient : « Ouvrez ! » Guiorgui, le matelot, obéit. De ses bras étendus, il maintient les premiers arrivants et leur parle.

— Que voulez-vous ? Nous ne cachons personne. Je suis un des vôtres. S’il y avait quelqu’un de suspect ici, je vous le dirais…

Paulia, la femme de chambre, les harangue à son tour. Peu à peu, la troupe se calme. Seul gesticule et menace encore un homme aviné. Cela même finit par provoquer une diversion. Les soldats, dont l’esprit est heureusement resté lucide, le prennent par le bras, l’entraînent. Les sabres, les baïonnettes retraversent la cour : nous sommes sauvés ! Béboussy, curieux, point effrayé, sort de sa cachette, tandis que nous nous affaissons sur des chaises, pâles et les jambes rompues. Recevoir une balle sur le front, ou même dans la rue, dans le feu de l’action, passe encore ! mais tomber, par surprise, sous les coups de sabre d’une multitude inconsciente !… La chair se révolte et s’effare. C’est