Page:Markovitch - La Révolution russe vue par une Française, 1918.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
262
LA RÉVOLUTION RUSSE

Pétrograd se sont livrés à Cronstadt ne semble pas avoir lénifié leur humeur tapageuse. Une grande agitation règne autour des usines sur la question des salaires et des heures de travail. À Gostiny-Dvor, les commis de magasins font grève. Les employés des tramways exigent, après la journée de huit heures, celle de six ! Là ne se bornent pas leurs prétentions. Ils déclarent que les tramways et tout le matériel leur appartiennent et ne veulent plus reconnaître l’autorité des directeurs et des ingénieurs. Ils se sont emparés de plusieurs de ces derniers, leur ont goudronné le visage, les ont enfermés dans des sacs après les avoir ficelés, puis ils les ont exposés dehors en cet état sur des petites charrettes à bras où ils resteront jusqu’à ce que quelque passant apitoyé vienne les mettre en liberté. Cet acte d’humiliante vengeance, indigne d’un peuple civilisé, s’appelle « la mise en brouette » et a déjà été pratiqué en Russie lors de la révolution de 1905.

Au milieu de ces excès, la Révolution tourne à la mascarade et les amis de la démocratie russe s’en affligent. L’Emprunt de la Liberté ne donnant que de maigres résultats, on a ima-