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LA RÉVOLUTION RUSSE

pour porter son blé à telle ou telle gare, distante parfois de 60 à 100 verstes. Il ne tient pas à recevoir de l’argent dont il ne sait que faire. Depuis la guerre, il ne trouve à acheter aucun des objets qui lui sont le plus indispensables tels que des clous, des fers à cheval, des ustensiles de ménage, des instruments agricoles… Jadis, c’était surtout l’Allemagne qui les lui envoyait… Un matin, on voyait arriver dans le village une britchka attelée d’un vigoureux cheval. Un homme en descendait, lourd, affable et loquace. C’était le commis voyageur allemand ! Il avait de tout dans sa britchka : des vis et des essieux pour les charrettes ; des fils, des aiguilles, de la poterie ou de la ferblanterie pour les ménagères ; des foulards et des rubans pour les jeunes filles, et jusqu’à des journaux de Pétrograd ou de Moscou pour le staroste (l’ancien du village). Et tout le monde d’accourir !… L’Allemand n’était pas aimé, mais on avait besoin de lui… L’arrivée de la britchka, que rien n’a remplacée, manque au village. — Cela est une des mille leçons de la guerre dont nous devrons savoir profiter aussi.

Dans certaines contrées éloignées de la