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UNE SEMAINE D’OURAGAN RÉVOLUTIONNAIRE

fraternel passe sur les âmes et les vivifie. Une émouvante atmosphère de liberté, d’amour, de sincérité enveloppe la ville. Cette fête du deuil est par excellence la communion de tous les cœurs russes dans un même sentiment de délivrance et de foi en l’avenir.

Pourtant on n’était, pas sans inquiétude, hier soir. On redoutait des provocations. Or la police n’existe plus et les miliciens sont encore bien novices dans l’exercice de leurs délicates fonctions… Le service des tramways et la circulation des véhicules de toute espèce ont été suspendus pour tout le jour. Au petit matin, l’aspect de la Newsky déserte, longée ou traversée par des miliciens portant le fusil sur l’épaule, rappelle celui des premiers jours de la révolution. Même terreur froide ; même attente anxieuse !…

Et, tout à coup, les sons lointains d’un orchestre jouant une marche funèbre retentissent… Un cortège arrive… Lentement, à pas rythmés et graves, il s’avance, de plus en plus distinct… En tête viennent les miliciens, puis les cercueils, drapés de rouge, portés sur tes épaules des ouvriers… C’est, celui de Wassiliewsky-Ostrow, suivi de la