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LA RÉVOLUTION RUSSE

murs sans l’émouvoir, les inquiétudes du ravitaillement se perdent dans l’ivresse de la liberté, toutes les difficultés à résoudre sont rejetées dans un avenir dont l’imprécision satisfait le tempérament temporisateur des Slaves.

Pendant que le peuple fête la liberté, le Gouvernement provisoire travaille pour lui. Bureaux et commissions siègent alternativement et sans interruption au Palais de Tauride. Tout est à réorganiser dans ce vaste empire, et à réorganiser en pleine invasion, avec une population mâle terriblement amoindrie. La tâche est rude. Seuls des Titans en pourraient assumer la responsabilité sans trembler. Les ministres de la jeune révolution russe sont, heureusement, ce que la nation compte de meilleur, de plus actif, de plus désintéressé et aussi de plus sage. Pendant les trois années de guerre qui rendirent si ardente leur lutte contre l’incapacité du gouvernement aujourd’hui déchu, ils ont pris, en même temps que l’habitude des affaires et du pouvoir, un contact intime avec le peuple et acquis une exacte connaissance de ses tendances et de ses besoins. Si les partis extrêmes