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ayez quitté cet amour-là ; c’est que je ne veux point que vous le gardiez, et vous ne le garderez point ; c’est moi qui vous le dis, qui vous en empêcherai bien. Aimer Damis ! épouser Damis ! Ah ! je suis votre sœur, et il n’en sera rien. Vous avez affaire à une amitié qui vous désolera plutôt que de vous laisser tomber dans ce malheur-là.

Phénice.

Est-ce que ce n’est pas un honnête homme ?

Lucile.

Eh ! qu’en sait-on ! Cet honnête homme ne vous aime pas, cependant il vous épouse. Est-ce là de l’honneur, à votre avis ? Peut-on traiter plus cavalièrement le mariage ?

Phénice.

Quoi ! Damis qui se jette à mes genoux, que vous avez trouvé tout prêt à s’y jeter encore !…

Lucile.

Voilà une petite narration de bon goût que vous me faites là ; je ne vous conseille pas de la faire à d’autres qu’à moi. Elle est encore plus l’histoire de vos faiblesses que de sa mauvaise foi, le fourbe qu’il est !

Phénice.

Mais enfin, d’où savez-vous qu’il ne m’aime point ?

Lucile.

Je vais vous dire d’où je le sais. Tenez, voilà Lisette qui passe ; elle est instruite, appelons-la. (Elle appelle.) Lisette, Lisette, venez ici.