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Araminte.

Eh bien ! est-ce un défaut ?

Ergaste.

Oui ; car votre douceur naturelle et votre politesse m’auraient trompé ; elles ressemblent à de l’inclination.

Araminte.

Je n’ai pas cette politesse et cet air de douceur avec tout le monde ; mais il n’est plus question du passé ; voici la marquise ; ma présence vous gênerait, et je vous laisse.

Ergaste, à part.

Je suis assez content de tout ce qu’elle m’a dit ; elle m’a parlé assez uniment.



Scène IV

LA MARQUISE, ERGASTE.
La Marquise.

Ah ! vous voici, Ergaste ? je n’en puis plus ; j’ai le cœur affadi des douceurs de Dorante que je quitte, je me mourais déjà des sots discours de cinq ou six personnes d’avec qui je sortais, et qui me sont venues voir. Vous êtes bien heureux de ne vous y être pas trouvé. La sotte chose que l’humanité ! qu’elle est ridicule ! que de vanité ! que de duperies ! que de petitesse ! et tout cela, faute de sincérité de part et d’autre. Si les hommes voulaient se parler franchement, si l’on n’était point applaudi quand on s’en fait accroire, insensiblement l’amour-propre se re-