Page:Marivaux - Théâtre, vol. II.djvu/310

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Lisette, riant.

On appelle cela avoir peur de son ombre.

Frontin.

Je voudrais pourtant de votre part quelque chose de plus sûr que l’indifférence ; il serait à souhaiter que vous aimassiez ailleurs.

Lisette.

Monsieur le fat, j’ai votre affaire. Dubois, que M. Dorante a laissé à Paris, et auprès de qui vous n’êtes qu’un magot, a toute mon inclination ; prenez seulement garde à vous.

Frontin.

Marton, l’incomparable Marton, qu’Araminte n’a pas amenée avec elle, et devant qui toute soubrette est plus ou moins guenon, est la souveraine de mon cœur.

Lisette.

Qu’elle le garde. Grâce au ciel, nous voici en état de nous entendre pour rompre l’union de nos maîtres.

Frontin.

Oui, ma fille : rompons, brisons, détruisons ; c’est à quoi j’aspirais.

Lisette.

Ils s’imaginent sympathiser ensemble, à cause de leur prétendu caractère de sincérité.

Frontin.

Pourrais-tu me dire au juste le caractère de ta maîtresse ?