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être que je n’aurais point d’amour ; car pourquoi est-ce que j’aime ? Parce qu’on me défiait de plaire, et que j’ai voulu venger mon visage ; n’est-ce pas là une belle origine de tendresse ? Voilà pourtant ce qu’a produit un cabinet de plus dans mon histoire.

Lisette.

Eh ! madame, Damis n’a que faire de cette aventure-là pour être aimable ; laissez-moi vous conduire.

Lucile.

Vous savez ce que je vous ai défendu, Lisette.

Lisette.

Je sors, car voilà votre père ; mais vous aurez beau dire, si Damis se voyait forcé d’épouser Phénice, ne vous attendez pas que je reste muette.



Scène III

M. ORGON, LUCILE.
M. Orgon.

Ma fille, que signifie donc ce que Lisette m’est venu dire de votre part ? Comment ! vous ne voulez pas voir le mariage de votre sœur ? Vous ne le lui pardonnerez jamais ? Vous demandez à vous retirer ? M. Ergaste, son fils et moi, vous nous chagrinez tous, et de quoi s’agit-il ? de l’homme du monde qui vous est le plus indifférent.

Lucile.

Très indifférent, je l’avoue ; mais la manière dont mon père me traite ne me l’est pas.