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que veut-il dire avec les gens de sa sorte ? Il me méprise, et je ne dirais mot ?

Mais entre nous, monsieur de la Vallée, reprit-elle, a-t-il tant de tort ? voyons, c’est un marchand, un bourgeois de Paris, un homme bien établi ; de bonne foi, êtes-vous son pareil, un homme qui est marguillier de sa paroisse ?

Qu’appelez-vous, madame, marguillier de sa paroisse ? lui dis-je ; est-ce que mon père ne l’a pas été de la sienne ? est-ce que je pouvais manquer à l’être aussi, moi, si j’avais resté dans notre village, au lieu de venir ici ?

Ah ! oui, dit-elle, mais il y a paroisse et paroisse, monsieur de la Vallée. Eh ! pardi, lui dis-je, je pense que notre saint est autant que le vôtre, madame d’Alain, saint Jacques vaut bien saint Gervais.

Enfin, ils sont partis, dit-elle d’un ton plus doux, car elle n’était point opiniâtre ; ce n’est pas la peine de disputer, cela ne les fera pas revenir ; pour moi, je ne suis point glorieuse, et je ne refuse pas de souper. À l’égard de votre mariage, il en sera ce qui plaira à Dieu ; je n’en ai dit mon avis que par amitié, et je n’ai envie de fâcher personne.

Vous m’avez pourtant bien fâchée, dit alors Mlle Habert en sanglotant, et sans la crainte d’offenser Dieu, je ne vous pardonnerais jamais le procédé que vous avez eu ici. Venir dire toutes mes affaires devant des gens que je ne connais pas, insulter un jeune homme que vous savez que je considère, en parler comme d’un misérable, le traiter