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pas venu ce matin, j’allais cet après-midi mettre tous mes amis par voie et par chemin ; votre sœur et M. Doucin sortent d’ici, qui venaient vous voir, ajouta-t-elle, à ma future ; allez, je ne les ai pas mal accommodés ; demandez le train que je leur ai fait. Le pauvre garçon est en prison, leur ai-je dit, vous le savez bien, c’est vous qui en êtes cause, et c’est fort mal fait à vous. En prison ? Eh ! depuis quand ? Bon ! depuis quand, depuis vos menées, depuis que vous courez partout pour l’y mettre ; et puis ils sont partis sans que je leur aie seulement dit : Asseyez-vous.

Par ce discours de Mme d’Alain que je rapporte, on voit bien qu’elle ignorait les causes de ma prison ; et en effet, Mlle Habert s’était bien gardée de les lui dire, et lui avait laissé croire que j’y avais été mis par les intrigues de sa sœur. Si Mme d’Alain avait été instruite, quelle bonne fortune pour elle qu’un pareil récit à faire ! Tout le quartier aurait retenti de mon aventure, elle aurait été la conter de porte en porte, pour y avoir le plaisir d’étaler ses regrets sur mon compte, et c’était toujours autant de mauvais bruits d’épargnés.

Eh mais ! dites-nous donc ceci, dites-nous donc ceci, dites-nous donc cela. C’était le détail de ma prison qu’elle me demandait ; je lui en inventai quelques-uns : je ne lui dis point les véritables. Et puis, je vous ai trouvé un prêtre qui vous mariera quand vous voudrez, me dit-elle, tout à l’heure s’il n’était pas trop tard, mais ce sera pour après minuit, si c’est votre intention.