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Mon dîner vint quelques moments après ; la comparaison que j’en fis avec celui qu’on m’avait apporté auparavant me réconforta un peu ; c’était un changement de bon augure ; on ne demande qu’à vivre, tout y pousse, et je jetai quelques regards nonchalants sur un poulet d’assez bonne mine dont je levai nonchalamment aussi les deux ailes, qui se trouvèrent insensiblement mangées ; j’en rongeai encore par oisiveté quelque partie ; je bus deux ou trois coups d’un vin qui me parut passable sans que j’y fisse attention, et finis mon repas par quelques fruits dont je goûtai, parce qu’ils étaient là.

Je me sentis moins abattu après que j’eus mangé. C’est une chose admirable que la nourriture, lorsqu’on a du chagrin ; il est certain qu’elle met du calme dans l’esprit ; on ne saurait être bien triste pendant que l’estomac digère.

Je ne dis pas que je perdisse de vue mon état, j’y