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Voici, lui dis-je, comment le tout s’est passé. Et là-dessus je commençai mon récit par ma sortie de chez le président ; de là j’en vins à l’embarras qui m’avait arrêté à cette allée dont je parlais, à cet inconnu qui m’y avait enfermé en s’enfuyant, à cette épée qu’il avait laissé tomber, que j’avais prise, enfin à tout le reste de l’aventure.

Je ne connais, lui dis-je, ni le tueur, ni les tués, qui n’étaient pas encore morts quand on m’a présenté à eux, et ils ont confessé qu’ils ne me connaissaient point non plus ; c’est là tout ce que je sais moi-même du sujet pour lequel on m’emprisonne.

Tout le corps me frémit, dit Mlle Habert ; eh quoi ! on n’a donc pas voulu entendre raison ? Dès que les blessés ne vous connaissent pas, qu’ont-ils à vous dire ? Que je suis peut-être le camarade du méchant homme qui les a mis à mort, et dont je n’ai jamais vu que le dos, répondis-je.

Cette épée sanglante avec laquelle on vous a saisi, dit l’habillé de noir, est un article fâcheux, cela embarrasse ; mais votre récit me fait faire une réflexion.

Nous avons entendu dire là-bas que, depuis trois ou quatre heures, on a mené un prisonnier qui a, dit-on, poignardé deux personnes dans la rue dont vous nous parlez ; ce pourrait bien être là l’homme qui a traversé cette allée où vous étiez. Attendez-moi ici tous deux, je vais tâcher de savoir plus particulièrement de quoi il est question, peut-être m’instruira-t-on.

Il nous quitte là-dessus. Mon pauvre garçon, me dit Mlle Habert