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épaules avec dédain. À qui parlez-vous ? a repris un des deux autres qui n’avaient pas salué non plus. À tous, ai-je répondu.

À ce discours, il a porté la main sur la garde de son épée. J’ai cru devoir tirer la mienne, en sautant en arrière, parce que deux de ces gens-là étaient au-dessus de moi, et avaient encore deux marches à descendre ; il n’y avait que l’autre qui était passé. Aussitôt j’ai vu trois épées tirées contre moi ; les lâches m’ont poursuivi jusque dans la rue ; et nous nous battions encore quand vous êtes venu à mon secours, et venu au moment où l’un de mes assassins m’allait porter un coup mortel.

Oui, lui dis-je, j’en ai eu grande peur, et c’est pourquoi j’ai tant crié après lui pour empêcher son dessein, mais n’en parlons plus ; ce sont des canailles, et la femme aussi.

Vous jugez bien du cas que je fais d’elle, me répondit-il, mais parlons de vous. Après ce que vous avez fait pour moi, il n’y a point d’intérêt que je ne doive prendre à ce qui vous regarde. Il faut que je sache à qui j’ai tant d’obligation, et que de votre côté vous me connaissiez aussi.

On m’appelle le comte d’Orsan ; je n’ai plus que ma mère ; je suis fort riche ; les personnes à qui j’appartiens ont quelque crédit ; j’ose vous dire qu’il n’y a rien où je ne puisse vous servir ; et je serai trop heureux que vous m’en fournissiez l’occasion ; réglez-vous là-dessus, et dites-moi votre nom et votre fortune.

D’abord je le remerciai, cela va sans dire ; mais