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ci est une chose à part ; elle me regarde encore plus que vous ; je me déshonorerais si je parlais. Quoi ! vous croyez qu’il faut que vous achetiez mon silence ! En vérité, vous me faites injure ; non, madame, je vous le répète, quelle que soit la façon dont vous me traitiez, il n’importe pour le secret de votre aventure, et si dans ce moment-ci vous voulez que je m’en aille, si je vous déplais, je pars.

Non, monsieur, ce n’est pas là ce que je veux dire, reprit-elle, le reproche que je vous fais ne signifie pas que vous me déplaisez ; ce n’est pas même votre amour qui me fait de la peine. On est libre d’en avoir pour qui l’on veut, une femme ne saurait empêcher qu’on en ait pour elle, et celui d’un homme comme vous est plus supportable que celui d’un autre. J’aurais seulement souhaité que le vôtre eût paru dans une autre occasion, parce que je n’aurais pas eu lieu de penser que vous tirez une sorte d’avantage de ce qui m’arrive, tout injuste qu’il serait de vous en prévaloir ; car assurément il n’y aurait rien de si injuste ; vous ne voulez pas le croire ; mais je vous dis vrai.

Ah ! que j’en serais fâché, que vous disiez vrai, madame, reprit-il vivement. De quoi est-il question ? D’avoir eu quelque goût pour ce jeune homme ? Ah ! que vous êtes aimable, faite comme vous êtes, d’avoir encore le mérite d’être un peu sensible !

Eh ! non, monsieur, lui dit-elle, ne le croyez point, il ne s’agit point de cela, je vous jure.

Il me sembla qu’alors il se jetait à ses genoux, et que l’interrompant : Cessez de vouloir me désabuser,