Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1827, tome 8.djvu/16

Cette page n’a pas encore été corrigée

il n’y aura que cela qui me donnera mon congé ; mais tant que mon âme et moi serons ensemble, nous vous suivrons partout l’un portant l’autre, entendez-vous, cousine ? Je ne suis pas peureux de mon naturel, qui vit bien ne craint rien ; laissez-les venir. Je vous aime, vous êtes aimable, il n’y aura personne qui dise que non ; l’amour est pour tout le monde, vous en avez, j’en ai, qui est-ce qui n’en a pas ? Quand on en a, on se marie, les honnêtes gens le pratiquent, nous le pratiquons, voilà tout.

Tu as raison, me dit-elle, et ta fermeté me rassure ; je vois bien que c’est Dieu qui te la donne ; c’est lui qui conduit tout ceci ; je me ferais un scrupule d’en douter. Va, mon enfant, mettons toute notre confiance en lui, remercions-le du soin visible qu’il a de nous. Mon Dieu, bénissez une union qui est votre ouvrage. Adieu la Vallée, plus il vient d’obstacles, et plus tu m’es cher.

Adieu, cousine ; plus on nous chicane et plus je vous aime, lui dis-je à mon tour. Hélas ! que je voudrais être à demain pour avoir à moi cette main que je tiens ! Je croyais l’avoir tantôt avec toute la personne ; quel tort il me fait, ce prêtre ! ajoutai-je en lui pressant la main, pendant qu’elle me regardait